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dimanche, 14 avril 2013

GOOGLE vs APPLE : Le choc des Titans arbitré par FACEBOOK, le Parasite

Article signé Farhad Manjoo :

 

Tout le monde attend le Facebook Phone depuis des années. Enfin, quand je dis tout le monde, je pense surtout aux journalistes spécialisés. Depuis 2009, au moins, c'est la foire aux rumeurs, fuites et autres scoops: il paraîtrait que Facebook aurait dans ses cartons un appareil destiné à concurrencer les smartphones d'Apple et de Google.  

Mais personne n'a jamais vraiment réussi à démontrer la pertinence d'un tel projet, que ce soit pour Facebook ou ses hordes d'utilisateurs. Si Facebook sort son propre téléphone, il peut espérer en vendre quelques millions par an –une paille, vu que le réseau social prétend avoir dépassé le milliard d'usagers.

Et d'ailleurs, qui voudrait d'un téléphone Facebook? Et à quoi pourrait ressembler l'engin? Si vous voulez avoir Facebook sur votre téléphone, c'est déjà possible –ses applications comme son site mobile sont extrêmement populaires, et ses boutons de partage sont installés par défaut dans la plupart des téléphones actuels, y compris l'iPhone. Pourquoi Facebook se casserait donc la tête à confectionner ses propres téléphones quand d'autres fabricants lui ont déjà mâché tout le boulot?

Une telle logique préside visiblement au lancement de Facebook Home, le gros truc que Facebook a dévoilé le 4 avril. Je parle à dessein de «truc», car Facebook Home n'est ni un téléphone, ni un système d'exploitation, ni une application. C'est une nouvelle interface d’accueil pour les téléphones Android, téléchargeable gratuitement. Si la plupart des téléphones font d'ores et déjà office de Facebook Phone, Facebook Home accentue encore plus leur facebookisation en plaçant les contenus Facebook (et donc des publicités, à un moment donné) dès leur écran d’accueil.

En précédant ainsi les applications Android, Facebook Home s'apparente à une formidable prise de jujitsu –le bouzin se sert de l'«ouverture» d'Android, le principal argument de vente de Google pour ses OS mobiles, pour transformer tous les téléphones en téléphones Facebook. Mais si cette stratégie fonctionne –si des millions de gens l'installent et que ces nouveaux écrans d’accueil deviennent à leur tour un argument de vente pour Android – il se pourrait bien que la manœuvre soit surtout dommageable à Apple. 

Pour comprendre le fonctionnement de Facebook Home, allez chercher votre smartphone et allumez le. Vous obtenez un écran avec une horloge, sans doute quelques alertes provenant de vos applications ainsi qu'un système quelconque de déverrouillage. C'est le «lock screen», l'écran de verrouillage de votre téléphone. Ensuite, quand vous déverrouillez votre téléphone, vous arrivez à l'écran d'accueil –l'interface qui regroupe toutes vos applications.

Si vous installez Facebook Home, ces deux écrans seront immédiatement remplacés par la nouvelle interface. Ensuite, dès que vous allumerez votre téléphone, vous tomberez sur le flux des publications de vos amis. Vous aurez la possibilité de les liker et même de les commenter sans avoir à déverrouiller votre téléphone. Pour accéder à vos applications, vous devrez taper dans une petite bulle pour faire apparaître un nouveau menu.

Facebook Home s'intercale donc entre vous et tous les trucs non-Facebook que vous voudriez faire avec votre téléphone. Au final, ça ressemble un peu à une infection parasitaire: avant, votre téléphone Android faisait tout, y compris aller sur Facebook et après, votre téléphone devient avant tout un appareil pour aller sur Facebook. Après quelques manipulations, si vous en avez envie, vous pourrez faire autre chose.

Lors de la conférence de lancement, Mark Zuckerberg s'est montré très optimiste sur les répercussions de son nouveau truc. Jusqu'à aujourd'hui, a-t-il affirmé, les interfaces des ordinateurs et des téléphones ont toujours été conçues autour des applications. Si vous voulez faire quelque chose avec votre appareil, vous devez tout d'abord cliquer ou taper sur une application. Mais pour Zuckerberg, ce style de navigation est dépassé, surtout sur les téléphones qui sont faits pour communiquer. D'où la question posée par Zuckerberg:

«Et si nous inversions le processus et faisions en sorte que nos téléphones soient d'abord conçus autour de nous, pour nous permettre ensuite d'interagir avec nos applications quand nous en avons envie?»

Je sais ce que vous vous dites: Je ne veux pas que Facebook prenne le contrôle de mon téléphone! Je veux mes applications! C'est horrible! Le monde court à sa perte! Oui, oui, bien sûr, et je partage votre sentiment. Mais je suis un gars d'une trentaine d'années qui écrit pour vivre et vous êtes du genre à lire des articles sur les technologies. En d'autres termes, nous sommes sans doute trop vieux et rouillés pour ce genre de trucs.

Mais figurez-vous qu'il y a des dizaines ou des centaines de millions de gens dans le monde qui passent quotidiennement des heures sur Facebook. Et de fait, selon les statistiques internes du réseau social, Facebook représente déjà le quart du temps passé sur les smartphones. Et qui plus est, beaucoup de gens utilisent des téléphones Android particulièrement mal foutus – des téléphones vendus pour une bouchée de pain et sur lesquels les fabricants ont installé d'horribles interfaces-utilisateur, des «skins», qui compliquent leur maniement. Pour les fans de Facebook et propriétaires de ce genre d'appareils, Facebook Home pourrait bien leur faciliter la vie.

Pour avoir manipulé ce nouveau système le jour de sa présentation, je ne peux pas dire qu'il s'agisse d'une évolution si épouvantable que ça. Facebook Home est une interface assez chouette et réactive – bien plus jolie que la plupart des OS mobiles, des écrans de verrouillage et d’accueil Android. J'ai aussi beaucoup apprécié une fonctionnalité très intuitive, même si elle répond au nom stupide de Chat Heads: quand vous recevez un message d'un ami, son visage apparaît sur votre écran dans une petite bulle; si vous la touchez, vous obtenez une fenêtre de réponse qui se superpose à l'application que vous êtes en train d'utiliser. Vous pouvez donc ainsi répondre à votre message tout en lisant un article de presse, sans avoir à quitter l'application dédiée – pour moi, cette technique de messagerie dépasse tout ce que j'ai pu voir sur le marché des téléphones.

Pour autant, je ne pense pas que Facebook Home me convienne. Je ne me sers quasiment pas de Facebook. Mais pour avoir un peu joué avec, je suis maintenant convaincu que les accros à Facebook devraient l'installer sur leur téléphone.

Le 12 avril, Facebook Home sera gratuitement téléchargeable sur lePlay Store de Google et ne fonctionnera au départ que sur une poignée de téléphones Android. (L'interface sera aussi installée par défaut dans un appareil de moyenne gamme, l'HTC First, vendu à 99 dollars). Mais très vite, Facebook planifie de la rendre compatible avec une large gamme d'appareils Android, tablettes y compris.

Et si Facebook peut le faire, c'est grâce à la conception spécifique d'Android. Google a voulu faire de son système d'exploitation quelque chose d’extrêmement flexible –les fabricants et les développeurs ont le droit de bidouiller tous les éléments du système. Google a tout misé sur cette ouverture: sa stratégie, c'est de donner gratuitement Android aux fabricants pour que le système soit adopté dans le monde entier. A long terme, Google espère générer des revenus avec son OS grâce à des publicités affichées sur tous ces appareils.

Mais l'ouverture d'Android risque aussi d'attirer les profiteurs: les concurrents de Google peuvent le détourner à leurs propres fins. C'est exactement ce qu'a fait Amazon avec ses tablettes Kindle Fire – ces appareils tournent sous une version modifiée d'Android qui fait la part belle aux services d'Amazon, pas de Google. Mais Facebook Home ne va pas aussi loin.

L'interface ne change rien à la plupart des applications standard de votre téléphone –elle n'a aucune incidence sur votre mail ni sur votre navigateur, et le reste de vos fonctionnalités demeurent identiques, c'est-à-dire des services Google. Donc s'il est vrai que Facebook Home aidera le réseau social à prendre les rênes des téléphones Android, au final, la manœuvre pourrait être bénéfique pour Google puisqu'elle incitera davantage de gens à acheter un téléphone Android.

Apple, par contre, a de quoi faire la grimace. Aujourd'hui, c'est sur Android que ses trois principaux concurrents – Google, Facebook et Amazon – investissent le gros de leur développement mobile, pas iOS. Si j'étais Tim Cook, je flipperais que Facebook réussisse à résoudre l'un des plus gros soucis d'Android – la «fragmentation» de son écosystème, qui fait que chaque téléphone Android n'a pas tout à fait la même tête, ni ne fonctionne tout à fait pareil (et en général, pas très bien).

C'est un très vieil argument de vente d'Apple: si vous apprenez à vous servir d'un iPhone, alors vous saurez vous en servir pour toujours – toutes les versions fonctionneront toujours plus ou moins selon la même logique. Aujourd'hui, Facebook casse cet avantage. En investissant pas mal de ressources pour concevoir une interface utilisateur ergonomique au fonctionnement identique, quels que soient les appareils Android, Facebook peut faire d'Android un système aussi facile à utiliser que l'iPhone. Google ne saute certainement pas de joie en voyant Facebook faire main basse sur l'écran d’accueil de ses téléphones, mais au final, c'est bien Apple qui a le plus à perdre dans cette histoire.

Farhad Manjoo


Je ris avec si peu...

Entre putain et puritain, il n'y a qu'un petit grain de ri...

Dont je me délecte pour ce dimanche midi,

Il m'en faut peu je sais!

 

lundi, 08 avril 2013

La recherche de la beauté, au-delà du bordel...


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